Le 18 janvier dernier, dans une mise à jour budgétaire à la communauté universitaire, le recteur Frémont annonçait la convocation d’une réunion spéciale du Bureau des gouverneurs le 30 janvier 2024 en raison d’un déficit prévu de 48 millions de dollars pour l’exercice en cours. Pour expliquer ce déficit, le recteur invoquait le sous-financement chronique du gouvernement, les récentes renégociations salariales liées à la loi 124 et le coût la mission francophone de l’université. De plus, il indiquait que l’administration centrale allait « entrer en contact prochainement avec les parties prenantes, y compris nos partenaires syndicaux » pour discuter des prochaines étapes. Ce premier message a été suivi, le 31 janvier 2024, par celui du provost et vice-recteur aux affaires académiques par intérim, Jacques Beauvais, annonçant que le Bureau des gouverneurs chercherait à assurer la viabilité financière de l’Université d’Ottawa à court et à moyen termes en mettant l’accent sur les chantiers suivants :
- L’optimisation des activités académiques, qui s’accompagnera notamment d’une révision du mode de prestation des cours et de la stratégie de recrutement;
- La révision du mode de prestation des services de soutien, dont les services auxiliaires et les différentes fonctions administratives;
- La génération de nouveaux revenus, entre autres par la formation continue, de nouveaux partenariats de recherche ou des programmes axés sur la demande.
Bien que l’administration centrale ait affirmé qu’elle communiquerait avec les parties prenantes dont les partenaires syndicaux pour discuter des finances et budgets de l’Université d’Ottawa, l’administration centrale n’a pas communiqué avec l’APUO. Tout comme nos membres, les seules communications que nous avons reçues à ce jour sur ce sujet sont les mises à jour budgétaires des 18 et 31 janvier. Avec son manque de transparence et de collégialité habituel, l’administration centrale n’a consulté ni l’APUO ni les autres parties prenantes pour planifier et établir les priorités énoncées dans la dernière mise à jour. Qui plus est, l’administration a refusé de partager les détails de la réunion du Bureau des gouverneurs avec la communauté du campus et avait même exclu la population étudiante de la liste d’envoi de la mise à jour budgétaire précédant cette réunion. L’APUO dénonce fermement cette opacité de l’administration centrale.
Puisque l’administration centrale a jugé bon de ne pas respecter l’engagement qu’elle avait pris de communiquer avec les syndicats du campus, l’APUO réitère sa position de longue date, à savoir que les budgets reflètent les priorités. Dans cette optique, nous rappelons à l’administration centrale que :
- L’éducation en français est une partie inhérente et intégrante des missions d’enseignement et de recherche bilingues de l’Université d’Ottawa et qu’elle doit être priorisée comme tel. L’APUO exige donc que l’administration centrale cesse de considérer l’éducation en français comme un fardeau et s’engage à affirmer et à renforcer le bilinguisme français/anglais et la francophonie dans tous nos programmes d’études, tant au premier cycle qu’aux cycles supérieurs.
- Comparativement aux autres universités ontariennes, l’uOttawa se classe parmi celles qui dépensent le plus en frais professionnels et services contractuels.1 Les 43 à 51 millions de dollars consacrés aux consultants externes au cours de chacune des cinq dernières années représentent des fonds qui auraient été bien mieux investis dans les missions d’enseignement et de recherche de l’Université d’Ottawa.2 Tout aussi révélateur des priorités de l’administration centrale est le fait que son déficit prévu de 48 millions de dollars ne dépasse que de peu l’estimation de 45 millions de dollars pour Workday. Conformément à la priorité accordée par l’APUO à la mission d’enseignement et de recherche de l’Université d’Ottawa, nous demandons un moratoire immédiat sur toute nouvelle dépense liée aux frais professionnels et services contractuels.
- Nous demandons également que les dépenses liées à la croissance de l’administration centrale au cours des dernières années soient examinées de très près afin d’identifier des gains d’efficacité et des économies plutôt que de poursuivre avec le type de mesures d’austérité auxquelles les travailleuses.eurs et les étudiant.e.s de notre université ont dû faire face depuis 2015. L’Audit de l’optimisation des ressources : Université York – Opérations et immobilisations du Bureau du vérificateur général de l’Ontario a constaté qu’entre 2018 et 2023, la taille de l’équipe de la haute direction de l’Université York avait augmenté de 37 % et les dépenses de rémunération connexes de 47 %. Conformément à la réglementation provinciale, l’Université d’Ottawa fera l’objet d’un audit semblable dans les années à venir. Face aux difficultés financières qui s’annoncent, un leadership efficace qui donne la priorité à la mission d’enseignement et de recherche de notre université doit entreprendre une évaluation immédiate de la croissance et des niveaux de rémunération totale de l’équipe de la haute direction au cours des dernières années et agir immédiatement en fonction des résultats plutôt que d’attendre une vérification provinciale à une date ultérieure.
En raison des politiques de financement de l’enseignement supérieur menées par le gouvernement actuel et les gouvernements précédents, les universités de l’Ontario sont confrontées à une série de problèmes financiers de plus en plus graves. L’APUO est prête à travailler aux côtés de l’administration centrale pour faire pression sur le gouvernement Ford afin qu’il investisse davantage dans le secteur universitaire de l’Ontario. Nous devrions être des alliés sur ce front. Aussi, l’APUO appuie les quatre recommandations énoncées dans le document Blueprint for Revitalizing Ontario’s Public Universities (seulement disponible en anglais) de l’Union des associations des professeurs des universités de l’Ontario (UAPUO).
- Augmentation cumulative du financement total des universités provinciales de 11,75 % pendant cinq ans pour atteindre la moyenne canadienne.
- Au lieu d’augmenter les droits de scolarité domestiques, l’UAPUO se joint à l’appel des groupes d’étudiant.e.s pour que le gouvernement augmente le budget de l’aide aux étudiant.e.s et convertisse les prêts en bourses.
- Un examen de la formule de financement provinciale de l’Ontario, y compris le modèle des couloirs différentiels, avec l’objectif intégré de soutenir la croissance des inscriptions domestiques.
- L’annulation de la mise en œuvre prévue du système de financement basé sur la performance.
L’APUO est prête à coopérer avec l’administration centrale sur ces questions et informera les membres de tout développement ultérieur. Si, comme l’a dit le recteur Frémont, il est temps pour notre université de se tourner vers sa véritable mission en tant qu’institution, il est alors certainement temps pour l’administration centrale de travailler avec l’APUO et les autres syndicats du campus et de prioriser réellement l’éducation et la recherche à l’Université d’Ottawa.
Lectures complémentaires :
Les membres pourraient être intéressé.e.s par les articles suivants publiés la semaine dernière sur ces questions :
- L’Université d’Ottawa trouve-t-elle que le français coûte trop cher ? par Émilie Gougeon-Pelletier and Ani-Rose Deschatelets pour le Droit
- Stacey: It’s time to shrink Ontario’s university administrations par le professeur Robert Stacey, membre de l’APUO
1. Voir le tableau « Dépenses budgétaires pour les services professionnels et les contrats externes (2019-2024) » dans le bulletin de juin 2023 de l’APUO : https://apuo.ca/bulletin-de-juin/?lang=fr
2. Voir article 1) Budget 2023-2024 d’uOttawa – Priorités douteuses dans le bulletin de juin 2023 de l’APUO : https://apuo.ca/bulletin-de-juin/?lang=fr